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BOURGOIN-JALLIEU Conseils de quartier : encore des progrès à faire 10/6/19

L’objectif des conseils de quartier est de faciliter la vie des habitants, d’améliorer leur quotidien en prenant part aux projets menés par la Ville ou en en proposant de nouveaux. Photo Le DL /V. P.
L’objectif des conseils de quartier est de faciliter la vie des habitants, d’améliorer leur quotidien en prenant part aux projets menés par la Ville ou en en proposant de nouveaux. Photo Le DL /V. P.

Les conseils de quartier s’achèvent au mois de juillet. L’occasion de dresser le bilan de ces années de concertation. Et de se poser une question : comment améliorer la formule ? Pour y répondre, nous avons rencontré les dix présidents des conseils de quartier berjalliens. Qui estiment qu’ils pourraient jouer un rôle plus important dans les projets menés par la municipalité.

On appelle ça la “démocratie participative”. Un joli pléonasme devenu projet politique, qui inscrit les citoyens au cœur de la vie publique de leur commune. « Elle a été au cœur de notre démarche tout au long du mandat », confie Vincent Chriqui. Lorsqu’il prononce ces mots, le maire pense notamment aux conseils de quartier (CQ), qui ont en effet pris une dimension nouvelle sous sa gouvernance.

Interrogés, les différents acteurs locaux font toutefois remonter une demande : peser davantage dans les décisions de la majorité.

« On pourrait travailler directement avec les services »

« On avait envie d’être sollicité, d’être exploité, parce qu’on a des compétences et qu’on a du temps, mais ça n’a pas toujours été le cas, c’est dommage », regrette ainsi Patrice Vesin, président du CQ Montbernier et ses coteaux.

D’après lui, certaines décisions, comme l’extinction de l’éclairage public dans son quartier passé minuit, n’ont jamais fait l’objet de discussions avec la Ville. « Le conseil de quartier doit faire émerger l’expertise des habitants, ajoute Alain Duparquet, l’un des cinq co-présidents du CQ Centre-ville-Pont Saint-Michel. Il faut que l’on soit dans une démarche de co-construction avec les élus, les habitants. Nous pourrions même directement travailler avec les services pour apporter notre expertise. »

DIX CONSEILS

➤ Mozas-Charbonnières : présidé par Brigitte Danthon. 
➤ Libération-Barbusse : Jean-Paul Lhuillier. 
➤ Champ-Fleuri : Bruno Rolland. 
➤ L’Oiselet/La Maladière : Chantal Bussy. 
➤ Charges-Planbourgoin et ses chemins : Marcel Péaud. 
 Pré-Bénit : Mauricette Chaffurin, Odile Martini, Wilfrid Semanaz, Gilles Thorand et Antonio Vaz-Vieira. 
➤ La Grive : Angéline Digon. 
➤ Centre-Ville/Pont-Saint-Michel : Alain Duparquet, Aïda Mahroug, Jean-Marc Soria-Siegler, Marie-Laure Tricaud-Zamparutti. 
➤ Champaret-Boussieu : Michèle Dorléac. 
➤ Montbernier et ses coteaux : Patrice Vesin.

Dans certains cas, on était bien loin de cette méthode. On pense par exemple à la construction du parking, quai des Belges, qui a fait grincer quelques dents. Antonio Vaz-Vieira, co-président du CQ Pré-Bénit, souffle : « Ce projet ne nous tenait pas à cœur et a été imposé par la municipalité. Tout s’est fait sans aucune consultation. » Gilles Thorand, coprésident, ajoute : « D’ailleurs, on n’a toujours pas compris pourquoi ce parking a été placé là. Il y a sûrement une bonne raison… qu’on ne nous a jamais donnée. »

Un projet enterré grâce au conseil de quartier ?

Attention, cela ne signifie pas que les rapports ont toujours été distants entre les conseils de quartier, Aurélien Lepretre, l’élu référent, et Cécile de Artola, qui fait le lien entre les différents acteurs. Chantal Bussy, présidente du conseil de quartier de L’Oiselet, explique par exemple que la mobilisation de ses membres a permis d’enterrer le projet de crématorium qui devait être installé entre les rues Lavoisier et L’Oiselet. Preuve que les habitants sont écoutés.

« L’encadrement est là, les élus sont là quand on en a besoin, note Angéline Digon, de La Grive. Pour aller plus vite, je pense qu’il faudrait surtout que l’on travaille encore plus main dans la main avec les associations, les écoles présentes au sein de nos quartiers. Si l’on ne fait pas ça, on n’y arrivera pas. »

« Nous pourrions par exemple travailler avec le lycée L’Oiselet sur des thématiques liées à l’environnement », renchérit Chantal Bussy.

L’objectif serait d’attirer davantage de participants, notamment de jeunes riverains, afin d’être davantage représentatifs et de peser un peu plus dans la balance. Reste maintenant à connaître les projets des candidats aux municipales de 2020.

Une chose est certaine : cette fameuse “démocratie participative” sera un point important pour une majorité des prochaines listes.

« Pour moi, ce n’est pas un problème qu’il y ait des débats, des oppositions vives, bien au contraire. Ce qui est important, c’est que les habitants aient un cadre pour s’exprimer et ils l’ont. Surtout, il faut éviter la politisation des conseils de quartier », assure le maire, Vincent Chriqui.
« Pour moi, ce n’est pas un problème qu’il y ait des débats, des oppositions vives, bien au contraire.
Ce qui est important, c’est que les habitants aient un cadre pour s’exprimer et ils l’ont. Surtout, il faut éviter la politisation des conseils de quartier », assure le maire, Vincent Chriqui.

VINCENT CHRIQUI : « LES DÉBATS ET LES OPPOSITIONS, CE N’EST PAS UN PROBLÈME »

Les conseils de quartier se terminent en juillet, quel bilan en tirez-vous ?

Vincent Chriqui : « C’est clairement une réussite, même si l’équilibre reste à parfaire. Déjà, je voudrais dire que les conseils de quartier étaient au cœur de notre démarche politique de démocratie participative. On a ainsi changé le mode d’élection des présidents, élus par les membres des différents conseils et non par la mairie. On a essayé de prendre en compte les remarques des habitants. Le contrat, c’est que tout le monde devait être impliqué. Ça a été respecté puisqu’on a eu de très nombreuses demandes, on a organisé plus de 150 réunions et investi près de cinq millions d’euros pour améliorer le quotidien des habitants des différents quartiers, même si tout ce qu’on a réalisé n’était pas demandé par les CQ. »

Comment pourriez-vous accorder davantage de responsabilités aux conseils de quartier ? L’idée d’un véritable budget participatif, par exemple, vous séduit-elle ?

« Oui, c’est une idée qui est intéressante, surtout sur des petits budgets. J’y vois toutefois une limite : comment coordonne-t-on ce budget avec des travaux plus conséquents dans la ville, comment s’organise-t-on avec le planning des travaux ? Après, oui, il faut que ces conseils de quartier restent intéressants, alors on se pose des questions pour s’améliorer : comment on engage des citoyens dans la vie municipale ? Quels outils on leur donne ? Comment leur permettre de travailler sur des sujets de plus grande ampleur ? Je ne vais pas détailler là mon futur projet, mais j’y reviendrai. »

Dans certains quartiers, l’élu référent n’a jamais été en contact avec le CQ, comment l’expliquez-vous ?

« Les élus n’avaient pas tous la même disponibilité, ni la même appétence pour cet exercice, c’est certain. Nous aussi on apprend, il faudra faire cela de manière plus rigoureuse la prochaine fois. »

Parfois, les débats ont aussi été animés avec les habitants…

« Pour moi, ce n’est pas un problème qu’il y ait des débats, des oppositions vives, bien au contraire. Ce qui est important, c’est que les habitants aient un cadre pour s’exprimer et ils l’ont. Surtout, il faut éviter la politisation des conseils de quartier. »

Vincent Chriqui et Aurélien Leprete à l’ouverture de la saison automnale des conseils de quartier, en 2016. Archives photo Le DL
Vincent Chriqui et Aurélien Leprete à l’ouverture de la saison automnale des conseils de quartier, en 2016. Archives photo Le DL

Leur crainte : la politisation des concertations

Faire un bilan des conseils de quartier (CQ) sans parler politique ? Impossible. Le sujet revient souvent, au fil des discussions et certains présidents ont un avis bien tranché sur la question.

« Le CQ n’est pas là pour faire de la politique »

Marcel Péaud fait partie des rares à avoir connu le fonctionnement des conseils de quartier sous les deux municipalités. Il est à la tête du secteur Charges-Planbourgoin depuis 12 ans. Sous l’ancien mandat, il ne fallait pas compter sur un vote à main levée pour élire le bureau : « Sa nomination était validée par une délibération au conseil municipal. J’avais été approché par un élu pour être président car je connaissais le quartier ».

Nouvelle mairie, nouveau fonctionnement. Sous Vincent Chriqui, ce choix est laissé aux habitants : « Le problème, poursuit-il, c’est que l’on vote pour des gens qu’on ne connaît même pas et qui, parfois, se mettent à politiser le système ». Un point qu’il regrette : « Le CQ n’est pas là pour faire de la politique. »

Ce même sujet irrite du côté de Libération-Barbusse : « C’était un thème de campagne de Vincent Chriqui, à charge contre l’ancienne municipalité car les conseils de quartier étaient pilotés par les élus. On ne peut pas critiquer le projet en place et faire pire qu’eux », déplore Sylvie Durand. « Faire pire », pour cette vice-présidente, c’est mal considérer leur rôle et laisser certains conseils de quartier à l’abandon.

Sont-ils des outils de communication pour la municipalité ? C’est la question que se pose le CQ Pré-Bénit : « On annonce un ordre du jour pour nos réunions et des points sont rajoutés par la mairie », constate Gilles Thorand. Lui et les autres co-présidents se souviennent : « Il y a des réunions où on s’est retrouvés avec des pages publicitaires présentées aux habitants par les élus, qu’on n’avait pas demandées. »

« J’ai l’impression qu’on me boycotte »

Il y a également ceux qui sont à contre-courant : « On a eu un gros clash au sujet de la future piscine de Champaret, avec Aurélien Lepretre, lance Michèle Dorléac du CQ Champaret. On m’a reproché de ne pas être allée dans le sens de la mairie lors d’une interview dans Le Dauphiné Libéré. Depuis, j’ai l’impression qu’on me boycotte. Si on va dans leur sens, tout va bien, sinon, c’est compliqué. »

Que certains quartiers soient politisés, Gérard Briquet n’en doute pas. C’est l’une des raisons qui l’a poussé à quitter la présidence du CQ Libération-Barbusse. « Champaret est opposé au maire, à Libération, ils sont du côté de Borne. Après, tout le monde s’étonne que les habitants ne s’y intéressent pas. Il ne faut pas tout mélanger. »

Les conseils de quartiers pensent qu’un projet fédérateur aurait permis à chacun de mieux se connaître. Archives photo Le DL
Les conseils de quartiers pensent qu’un projet fédérateur aurait permis à chacun de mieux se connaître. Archives photo Le DL

LEUR POINT COMMUN : ILS DÉPLORENT L’ABSENCE D’UN PROJET FÉDÉRATEUR

Ce dernier point chagrine beaucoup de présidents de conseils de quartier (CQ). C’est l’absence d’un projet commun aux différents secteurs. « Ce qui manque vraiment, d’après moi, c’est qu’il n’y ait pas eu plus de contacts entre les différents conseils de quartier, souligne Brigitte Danthon, présidente du CQ Mozas-Charbonnières. Pourquoi n’a-t-on pas organisé une grande fête de quartiers, par exemple ? »

Elle évoque également un projet de balade à la découverte de la ville, qu’elle a imaginé et qui aurait pu être mis en place avec les différents quartiers… Mais la mayonnaise n’a jamais pris. « Il y a bien eu ce projet de nettoyage de printemps avec les autres, ajoute Bruno Rolland du CQ Champ-Fleuri. Mais personne n’est venu. Tout ce qui intéresse les gens, c’est ce qu’il se passe devant leur porte. »

De son côté, Marcel Peaud (CQ Charges-Planbourgoin) est plus philosophe : « On n’a pas réussi à trouver un projet fédérateur. Il y a un vrai manque de connexion entre les CQ, c’est dommage. » Dans son coin, chacun le déplore. C’est même un incontournable de la discussion. Ici et là, on a même entendu une raison : les diverses personnalités à la tête des quartiers n’auraient pas pu s’entendre.

Des composteurs partagés qui séduisent

Pourtant, l’un des projets du CQ Centre-ville-Pont-Saint-Michel pourrait bien être étendu au reste de la ville. « Le projet le plus marquant que l’on a proposé est celui des composteurs partagés, détaille Alain Duparquet. On a fait un dossier complet avec les budgets, les éléments légaux et la Ville a été enthousiasmée. L’idée a été reprise pour un projet de ville. »

Belle idée qui ne fait toutefois pas l’unanimité parmi les présidents de CQ. « Il est nécessaire de créer une dynamique autour des habitants, de faire de la pédagogie, affirme Jean-Paul Lhuillier (CQ Libération-Barbusse). Sinon, l’idée va finir tout droit dans le compost ! » Là aussi, il y a des progrès à faire pour parvenir à se mettre d’accord. Mais c’est aussi ça, le but de la démocratie participative : provoquer et élever le débat.

Par Clémence BEYRIE et Vincent PROD’HOMME | Publié le 10/06/2019 à 18:30 |